Un café pour rompre l'isolement
Ce jeudi 06 décembre 2018, en passant la porte du café Inter-âges, un petit groupe d’une vingtaine de personnes s’active. De 54 à 90 ans, ce sont en majorité des femmes qui se rassemblent deux jeudis dans le mois dans cette petite salle aux murs roses adossée à la résidence La Sablière. Des activités manuelles ou artistiques sont chaque fois au rendez-vous. Une initiative qui vient rompre l’isolement des personnes âgées du 12ème arrondissement. Des objets de toute sorte ont été soigneusement disposés sur une petite table au fond de la pièce. Un marque-page, un médaillon, un doudou, un coq en miniature, des bijoux…Michèle, l’une des organisatrices annonce le thème de l’après-midi “raconter un pan de son histoire grâce à un objet”.
Chacune son tour, elle s’avance devant l’assemblée, racontent leur passé, leurs souvenirs et témoignent sans faux semblants.

"Bienvenue au Café inter-âge" s’exclame Michèle de l’équipe organisatrice.

"Il y a bien 60 ans, ma mère aimait beaucoup lire. Mais quand quelqu’un arrivait, elle cachait son bouquin sous la table. Parce que ce n’était pas bien venu de lire, il fallait travailler. Elle réalisait plein d’oeuvres ; des tableaux avec des fils, de la tapisserie et je ne sais pas comment j’ai hérité de ceci. Et ça me rappelle ma mère." - Michèle

"J’aime beaucoup lire et chaque fois que je vais faire des expositions, je regarde si il y a des marque-pages. Mais celui-là il est particulier car le visage de cette dame est une partie d’une oeuvre réalisée par Élisabeth Vigée Le Brun, une peintre française C’est une oeuvre pleine de tendresse. Une dame a la tête inclinée et sa fille dans ses bras tourne la tête vers le public. D’ailleurs ça s’appelle la tendresse maternelle." - Josseline

"Ce souvenir que je porte depuis très longtemps est un souvenir de mon père qu’il avait lors de la guerre 14. Il l’a porté pendant toute la guerre sur lui et me l’a donné. Il m’a tellement raconté les souffrances et les espoirs des hommes de cette époque. Pour moi, c’est sacré." - Gyselle

"Ces fameux bracelets ont été offerts par un ami il y a 25 ans, expatrié en Indonésie." - Béatrice

"Il avait envie de me faire plaisir, donc il a acheté ces bracelets. Il voulait que je les porte tout le temps. Je les porte toujours”
- Béatrice

"On apprend à se détacher avec la vie. Même si je les perdais, ce ne serait pas un drame”
- Béatrice

"C’est un petit flacon de toilette qui traîne dans ma cuisine depuis pas moins de 20 ans.
Je tiens beaucoup à cet objet là acheté dans une galerie marchande située dans le sous-sol de l’une des tours jumelles de Manhattan qui sont tombées une grosse semaine après mon achat.”
- Christiane

Elle nous montre des images de la destruction des tours jumelles sur lesquelles on peut lire “Wi will never forget”. On n'oubliera jamais.
"9h du matin là-bas. Ici dans l’après-midi, je me vois encore dans mon bureau, mon mari m’appelant par téléphone pour me dire qu’ ‘Il n’y a plus de tours jumelles. Et puis, il me dit ; regarde la télévision ! Quand on y était la semaine précédente, on n’oublie pas.
Voilà ce flacon, c’est une chose toute bête qu’on n’a pas envie de jeter."
- Christiane

"C’est un foulard qui m’a été offert il y a quelques années par un groupe d’amies qui était en classe plus ou moins avec moi à Brignoles dans le Var. C’est plein de souvenirs car ce sont des copines d’écoles. On a même fait les vendanges dans le Vars une année où il pleuvait comme des cordes. J’ai une amie qui a perdu une botte dans la boue mais on riait tout le temps. On a toujours plaisir à se retrouver même après les années qui passent."- Ginette

“A l’époque, je me souviens qu’on dansait beaucoup quand j’avais 20 ans et nos mères nous emmenait au bal parce qu’on avait pas le droit d’y aller seule. Quand on dansait, nos mamans discutaient entre elles. Et on rentrait à 2 heures du matin, les chaussures à la main car le bitume était brûlant. A Brignoles, on a dansé une fois pendant 4 jours sur la place de la paroisse. C’était extraordinaire”
- Ginette

"C’est un souvenir qui date de ma naissance. Cet objet a 88 ans et quelques jours"
- Jeanine

"Je l’ai montrée à ma fille mais défense d’y toucher. Pareil pour mes deux petits-enfants.
Donc il est comme ça dans mon armoire emmitouflé pour qu’il n’ait pas froid.”
- Jeanine

"C’est un cadeau qui m’a été offert quand je suis née. Evidemment, ma mère l’a rafistolé. Et comme il était tout nu et qu’il pouvait avoir froid, elle lui a fait un pygama.Et ma tante qui faisait du crochet lui a fait également un châle. Quand, j’avais la trouille, je prenais le doudou. J’avais entre 10 et 14 ans mais ça me rassurait !”
- Jeanine

"C’est un coq qui appartenait à ma mère qui lui avait été offert par sa meilleure amie qui était portugaise. Pour les 50 ans de ma mère, elle lui avait ramené ce coq de son pays.”
- Rose

Rose nous lit la légende du coq de Barcelos.
“C’est une histoire morale, optimiste et juste. Maman m’a offert ce coq quand elle a su que je commençais une collection de coqs et de poule. Ce fût le premier élément de ma collection."